Les européennes de l’énergie

Sortie de l’euro, montée des extrêmes : les résultats des élections européennes qui se sont tenues dimanche dernier occupent la presse et déchaînent les passions. Qu’en est-il de la politique énergétique ? Alors que les sujets économiques et de société semblent monopoliser le débat public, quelle place pour la transition énergétique au Parlement européen ? Décryptage.

Si la place de l’énergie dans le programme du Front National ne saute pas aux yeux à première vue, c’est tout de même dans la catégorie « Avenir de la Nation » que le parti arrivé en tête des élections européennes en France (25,01 % des voix) traite la question. La viabilité des ressources renouvelables, hors énergie hydraulique, y est exclue. Elles constitueront au mieux 10 à 15 % de la production énergétique à terme, nous dit Mme Le Pen. Le nucléaire est la solution de moyen terme qui est proposée. Encadré par l’État bien sûr, car l’énergie est érigée au rang d’intérêt stratégique et sécuritaire pour la France. Et à long terme ? « Pour réduire la part du nucléaire, la recherche sera valorisée dans les énergies renouvelables et dans les nouvelles sources d’énergie que la science permettra de créer », lit-on. L’hydrogène est également à l’honneur et le programme ITER à Cadarache n’est pas remis en question.

Le programme ITER constitue également un atout important pour le parti qui prend la deuxième position aux élections. L’UMP (20,79 % des voix) présente sa politique en matière d’énergie comme une composante essentielle des grands projets européens de croissance. Ses propositions pour « la croissance, la compétitivité et l’emploi » énumèrent en quelques lignes brèves et simples la politique de l’UMP sur la question. Nucléaire, gaz et hydrogène. Et la place de la transition énergétique ? « Chaque État membre doit pouvoir choisir son mix énergétique. »

C’est dans les points 18 à 21 de son programme pour les européennes que l’UDI-Modem (9,89 % des voix) développe sa vision pour l’énergie européenne. Il s’agit tout d’abord d’accroître la coopération dans ce domaine en engageant un « Grenelle de l’environnement » européen et en renforçant le Système européen d’échange de quotas d’émissions-ETS (réduction de 50 % des émissions de CO2 européennes d’ici 2030 par rapport aux émissions en 1990), tout en allouant une partie du budget européen à la promotion des activités énergétiquement autonomes. Par conséquent, l’objectif est aussi d’assurer l’indépendance énergétique de l’Europe en conciliant croissance et respect de l’environnement.

Qu’en est-il à gauche ? Pour le PS, arrivé troisième avec sa liste « Choisir notre Europe » (13,99 % des voix), « le potentiel européen en énergie solaire, éolienne, de la biomasse, géothermique, hydraulique houlomotrice et énergie marémotrice est énorme. Il faut le valoriser en soutenant les innovations techniques et en développant les meilleures pratiques ». Investissements privés mais aussi investissements publics et politique coordonnée à l’échelle européenne sont le principal moteur d’une transition coûteuse mais nécessaire.

Europe Écologie Les Verts, qui talonne l’UDI-Modem de près avec 8,93 % des voix, est bien sûr la liste qui a mis le plus d’accent sur la transition énergétique. Les Verts prônent la suppression du nucléaire, l’interdiction des gaz de schiste, et misent sur 45 % d’énergies renouvelables en 2030. Le Front de Gauche les suit (6,34 %) avec une idée en propre : la taxe kilométrique au niveau européen. Et bien sûr l’enclenchement de la transition écologique comme fondement de la restructuration des économies.

Si elles n’ont aligné que peu de voix, les « petites » listes se sont souvent montrées innovatrices en matière d’énergie. La liste Europe Citoyenne, issue du parti de Corine Lepage, place la transition énergétique en tête de ses propositions de campagne et propose l’instauration d’une cour pénale internationale pour l’environnement et la santé. Nouvelle Donne de son côté suggère un emprunt à taux zéro auprès de la BCE (via la BEI) pour « financer les travaux et investissements d’économies d’énergie ». La France toucherait ainsi 20 milliards d’euros, dédiés à la modernisation énergétique des maisons, usines et bureaux.

Bien sûr, les décisions ne se feront pas en fonction de la France seule. Les résultats français donnent néanmoins un assez bon aperçu des tendances politiques qui agitent le Parlement européen, et des replis nationaux qui sont à attendre dans tous les domaines. L’énergie, secteur stratégique de sécurité et d’indépendance nationale, n’y échappera pas.

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