Hervé Morin : mobilisé pour soutenir les filières économiques d’avenir

Dans le cadre du groupe d’experts du contre-gouvernement de l’UDI, le « shadow cabinet » du parti centriste, l’ancien ministre de la Défense Hervé Morin a récemment engagé un travail législatif concernant l’efficacité énergétique, parmi d’autres propositions de loi destinées à soutenir les filières françaises innovantes. Les équipes de j3e ont souhaité en savoir davantage sur les positions d’Hervé Morin au regard de la filière du « smart building ».

j3e – Depuis quand et pourquoi vous intéressez-vous à l’efficacité énergétique ?
Hervé Morin – Je suis heureux d’avoir fait partie du premier gouvernement qui se soit réellement préoccupé de la question écologique en France, notamment en impulsant le Grenelle de l’environnement. L’UDI, c’est d’ailleurs le parti du Grenelle de l’environnement, avec les figures de Jean-Louis Borloo, Ch a n t a l J o u a n n o , Bertrand Pancher… J’ai personnellement toujours été frappé par la sombre prédiction de l’économiste Malthus, pour qui l’accroissement limité des ressources naturelles ne parviendrait pas à répondre à la demande d’une population en croissance plus importante. Ce constat d’irrémédiabilité a été démenti à maintes reprises, du temps même de Malthus, par le génie humain qui a su développer de nouvelles techniques pour subvenir à ses besoins. L’énergie connaît le même problème : depuis le premier choc pétrolier, nos sociétés sont traversées par l’angoisse de l’épuisement des ressources. Or, je crois que là encore il faut faire confiance au génie humain : l’accélération du recours aux énergies renouvelables en est un exemple criant mais je pense que l’efficacité énergétique est une solution d’autant plus intéressante qu’elle renverse la perspective. En effet, il n’est plus question d’augmenter les ressources mais de les optimiser. Grâce aux progrès de la technique, il devient possible de mettre à la portée de tous des solutions personnalisées, simples d’utilisation pour que chacun maîtrise sa consommation.

j3e – Pensez-vous qu’il y a urgence à agir ?
Hervé Morin – Oui et à plusieurs niveaux. Il y a toujours urgence à agir dans une économie mondialisée parce que nous sommes en concurrence : l’efficacité énergétique permet à un écosystème de grands industriels et de jeunes start-up de se développer et de construire la croissance de demain, en créant des emplois qui ne sont pas délocalisables. Il y a d’autant plus urgence à agir en matière d’énergie car cela concerne notre dépendance aux importations de pétrole et de gaz. Nous sommes à un moment où la France cherche à faire des économies pour sortir de la spirale de l’endettement : les mesures d’efficacité énergétique ont permis à 11 membres de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) d’économiser l’équivalent de 420 mds $ de pétrole en cinq ans. En se positionnant sur ce sujet, nous réduisons la facture de l’Etat, des entreprises et surtout des ménages, dont plusieurs millions en France sont touchés par la précarité énergétique. L’urgence devient critique dès lors que l’on prend également en compte la santé. L’air que nous respirons à l’intérieur des bâtiments est plus pollué que l’air extérieur : cela peut changer grâce aux dispositifs de capteurs et de ventilation disponibles dans le bâtiment intelligent, de la même manière que les chemins lumineux peuvent aider les personnes âgées à éviter les chutes. Enfin, l’efficacité énergétique est l’une des solutions pour réduire notre empreinte carbone. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce sujet avec la tenue de la prochaine conférence climat à Paris l’année prochaine.

j3e – La France vous semble-t-elle bien placée dans ce domaine ?
Hervé Morin – Nos entreprises comptent parmi les plus performantes, que ce soit Schneider, mais aussi Bouygues, Legrand, Rexel, Saint-Gobain, GDF Suez ou Vinci pour ne citer qu’elles. Il faut aussi saluer les jeunes start-up comme Ijenko dans le pilotage de la consommation du bâtiment ou Sfereno pour les logiciels d’audit. Il faut les accompagner car se positionner sur l’efficacité énergétique, c’est prendre de l’avance dans un secteur d’avenir, celui des logiciels, des capteurs et des objets communicants qui sont à la base de la compétitivité dans l’usine du futur et qui finiront par concerner tous les aspects de notre vie quotidienne. Ce qui ressort des consultations que j’ai pu mener auprès de ces différents acteurs, c’est que la filière est prête mais qu’elle souffre encore de deux problèmes qui ne peuvent être réglés que par l’intervention du législateur : le manque d’outils de financements innovants et l’existence de verrous juridiques. C’est là-dessus que j’entends agir.

« Nous sommes à un moment où la France cherche à faire des économies pour sortir de la spirale de l’endettement : les mesures d’efficacité énergétique ont permis à 11 pays de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) d’économiser l’équivalent de 420 mds $ de pétrole en cinq ans. »

j3e – Pouvez-vous nous présenter les grandes lignes de votre proposition de loi ?
Hervé Morin – Je propose trois solutions pour dégager le secteur de ses freins : financer, simplifier et démontrer. D’abord, il faut consolider le rôle du tiers investissement, qui permet à un tiers de financer la rénovation en se remboursant en partie sur les économies d’énergie qu’il garantit. Afin de donner plus d’impact au tiers financement, je souhaiterais créer un fonds souverain financé pour partie par les fonds destinés à couvrir les charges liées au démantèlement nucléaire.

Comme nous sommes conscients que l’Etat traverse une période économiquement difficile, nous avons fait preuve de responsabilité afin que la proposition de loi ne coûte pas un centime aux deniers publics. Ensuite, la loi entend simplifier le déploiement de l’efficacité énergétique à deux échelles : en optimisant différents mécanismes fiscaux et en simplifiant les certificats d’économie d’énergie pour les rendre plus compréhensibles par les acteurs du marché. Nous souhaiterions aussi aller plus loin pour débloquer le contrat de performance énergétique dont l’utilisation demeure trop embryonnaire. Enfin, il est nécessaire de donner aux régions un droit à l’expérimentation : ce n’est qu’avec des preuves tangibles du formidable potentiel d’économies et de croissance que recèle l’efficacité énergétique que nous pourrons accélérer son déploiement, comme le prouve d’ailleurs le Hive de Schneider, à Rueil-Malmaison, que j’ai visité. Cette mesure vise aussi à personnaliser les systèmes énergétiques locaux en fonction des forces et des besoins de chaque territoire.

INT_HIVE-by-nightj3e – Vous vous intéressez à l’innovation, pourquoi ?
Hervé Morin – Les économistes considèrent que les pays développés comme la France ont atteint la frontière technologique, c’est-à-dire que la croissance ne peut plus venir du seul rattrapage de grandes puissances comme les Etats- Unis. Pour paraphraser l’économiste Paul Krugman, la croissance ne doit plus venir uniquement de la transpiration mais bien aussi de l’inspiration. Désormais, l’innovation est essentielle pour ouvrir et conquérir de nouveaux marchés. C’est en disposant d’un écosystème propice à son développement que nous attirerons les investissements et serons à même d’exporter nos technologies et notre savoir-faire. A l’UDI, nous pensons qu’il faut soutenir les filières économiques où la France est en position de leader, parmi lesquelles figure en belle place la filière de l’efficacité énergétique et du pilotage des équipements énergétiques. Les visites que j’ai faites, notamment chez Schneider, m’ont confirmé dans le fait que nous regorgeons d’une énergie et d’un talent incroyables en France. Je ne dis pas que les gouvernements dans lesquels j’ai participé aient été irréprochables, mais je ressens aujourd’hui une désagréable impression de gâchis.

« Ce qui ressort des consultations que j’ai pu mener auprès de ces différents acteurs, c’est que la filière est prête mais qu’elle souffre encore de deux problèmes qui ne peuvent être réglés que par l’intervention du législateur. »

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Hervé Morin en visite au Hive

Le 10 avril dernier, l’ancien ministre et actuel député UDI Hervé Morin s’est rendu au Hive, le siège social de Schneider Electric. Cette visite privée a été l’occasion d’échanges intéressants entre les équipes de l’industriel et le responsable politique sur le thème de l’efficacité énergétique, pour présenter d’un côté les solutions de l’entreprise et de l’autre celles des pouvoirs publics.

Véritable laboratoire et vitrine de Schneider, le Hive (ruche, en anglais) rassemble le meilleur des technologies du groupe, au point que les différentes modifications apportées au bâtiment lui permettent de répondre aux critères de la plupart des meilleurs normes et classements environnementaux. Alors que la consommation d’électricité s’y élevait à 320 kWh/m2/an il y a seulement 5 ans, celle-ci a été divisée par 4 depuis lors. Schneider a présenté, outre les infrastructures actuelles du site (bornes de recharge électrique, logiciels de pilotage du bâtiment, variateurs de vitesse des dispositifs de ventilation…), sa nouvelle box domotique Wiser qui se distingue par un fonctionnement simple et un retour sur investissement inférieur à 3 ans.

La visite ne s’est pas limitée aux solutions énergétiques du bâtiment résidentiel et tertiaire. Hervé Morin a ainsi pu observer le fonctionnement des logiciels et automates industriels de Schneider, ainsi que les évolutions de son positionnement vers les services. Enfin, le député a pu observer un datacenter géré et optimisé par Schneider.

L’ancien ministre de la Défense est déjà un connaisseur des enjeux de l’efficacité énergétique et du secteur : cette visite intervient au moment où Hervé Morin apporte les dernières retouches à la proposition de loi sur l’efficacité énergétique que le groupe UDI a déposée fin avril dernier. Lui et son équipe ont mis en avant les mesures que le groupe UDI envisage de mettre en place pour une France économe en énergie, ce qui passe à ses yeux par l’évolution de l’environnement normatif et réglementaire. Jugeant primordial le développement d’une grande filière française, le député a à ce titre félicité Schneider pour l’excellence dont elle fait preuve, en exprimant le voeu que l’Etat sache déployer la même exemplarité que l’industriel dans la consommation d’énergie de ses bâtiments.

Ce type de visite montre une fois encore, s’il en était besoin, l’intérêt de telles rencontres enrichissantes entre industriels de la filière et dirigeants politiques…

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