
Dans le cadre d’un contrat de performance énergétique initié par la maire de Calais, Natacha Bouchart, la ville a lancé une opération de mise en lumière d’édifices emblématiques, projet appelé « Lumière Calaisienne (LuCa) ».
Sylvain Bigot, de l’agence Lyum, s’est vu confier la conception lumière de l’ensemble des monuments. Parmi les réalisations déjà achevées figurent le beffroi de l’hôtel de ville ainsi que la place Crèvecoeur et ses trois édifices majeurs : l’église Saint-Pierre, le palais de justice et la Bourse du travail.
Cette démarche s’inscrit de manière cohérente dans la vision du plan lumière de Calais, révélant l’âme nocturne de la ville tout en respectant son héritage historique. Ainsi, la place Crèvecoeur, désormais illuminée, devient l’un des points d’orgue d’une stratégie lumière qui, tout en valorisant le passé prestigieux de Calais, participe activement à la construction de son avenir. Cet équilibre entre patrimoine historique et modernité, entre permanence et renouveau, confère à l’éclairage public une dimension qui va bien au-delà que l’aspect fonctionnel : il devient l’expression lumineuse de l’identité calaisienne.
Les prochaines étapes du projet concerneront le fort Risban, la citadelle avec la Porte de Neptune et la Porte de Boulogne et l’hôtel de ville. L’opération englobe la rénovation de 23 km de réseau, 8 000 points lumineux rénovés, 75 % d’économies d’énergie.
« Au départ, il n’était pas question de procéder à la mise en lumière des monuments, mais lorsque j’ai présenté à l’oral quelques mises en lumière, l’idée a tout de suite séduit la maire de Calais, commente Sylvain Bigot. J’ai donc étudié l’histoire de chaque monument, analysé les détails architecturaux pour m’en inspirer et favoriser les ombres dans le concept lumineux. J’aime faire appel à des lumières colorées qui évoluent dans le temps et sont en mouvement, avec différents scénarios permettant de faire vibrer les façades. La technologie est un outil précieux en éclairage, non pas pour reproduire la vision diurne, mais pour révéler une autre architecture, plus singulière, comme cela fut le cas pour le beffroi de l’hôtel de ville. »

Culminant à 75 m de hauteur, conçu par l’architecte Louis Debrouwer, et inauguré en 1925, le beffroi est constitué d’une tour carrée de briques rouges et pierres blanches abritant une horloge et un carillon électronique. « Nous avons encastré des projecteurs au pied du beffroi, décrit Sylvain Bigot, et pour la partie supérieure, nous avons disposé des luminaires à distance ou au niveau de l’horloge et des passages. » Les quatre faces bénéficient d’un éclairage rasant mis en scène par des séquences dynamiques de deux minutes (allant d’une teinte de blanc chaud à la base à blanc froid au sommet), et différentes la semaine du week-end. Pour les périodes festives, l’éclairage fait appel à un système RGBW et RGBA conçu autour de thèmes spécifiques.
La place Crèvecoeur a, en fait, été le premier site à bénéficier d’une mise en lumière : installées tout autour de la place, 36 colonnes Creille, fabriquées sur mesure par Technilum, rendent hommage à la dentelle de Calais. « Les projecteurs restent en blanc fixe et l’intérieur de la colonne change de couleur en RGBW. Tous les scénarios de mise en lumière et de projection de gobos (plusieurs thèmes), incluant les trois monuments, sont synchronisés », précise le concepteur lumière.
L’église Saint-Pierre

De style néo-gothique, en forme de croix latine, cette église fut construite de 1862 à 1870 et on doit son architecture à Émile Boeswillwald, élève de Viollet-le-Duc. Elle compte 11 niveaux, balayés par un éclairage rasant allant du blanc chaud au blanc neutre en haut. « Le premier niveau est mis en lumière par des projecteurs discrètement encastrés dans le sol, invisibles durant la journée, qui soulignent les contrastes chromatiques saisissants entre la brique rougeâtre et les contreforts en pierre blanche, reprend Sylvain Bigot. L’imposant vitrail du portail, illuminé depuis l’intérieur, projette vers l’extérieur ses couleurs éclatantes, établissant un dialogue entre les espaces intérieur et extérieur du monument. » Le clocher, élément culminant à 65 m de hauteur, impressionne par son élégance. Son impact visuel s’intensifie particulièrement lorsqu’on l’observe depuis la rue du Jardin des Plantes, où sa silhouette élancée se détache avec majesté dans le paysage urbain. Pour accentuer sa présence nocturne, des projecteurs extérieurs viennent en soutien une fois la nuit tombée.
La Bourse du travail

Édifiée de 1937 à 1939 au cœur du quartier ouvrier de Saint-Pierre par l’architecte Roger Poyé, cette ancienne Bourse du travail, aujourd’hui salle de spectacles, offre une façade austère qui s’élève sur quatre étages. La mise en valeur lumineuse des parties inférieures du bâtiment souligne les entrées. Elle est réalisée à l’aide de projecteurs positionnés en contreplongée le long des piliers de chaque portail de la façade principale, valorisant ainsi la texture et la couleur caractéristiques des briquettes de parement.
« Le bas-relief est éclairé par quatre réglettes installées en remplacement des projecteurs préexistants. Cette configuration révèle le fronton grâce à un éclairage en plongée parfaitement maîtrisé. Au pied de chaque pilier et au-dessus du bas-relief, des projecteurs créent un contrepoint coloré qui accentue les détails du béton, plus clair que les briquettes de parement, sublimant ainsi les nuances architecturales de l’édifice », précise Sylvain Bigot.
Des projecteurs installés sur les nouveaux mâts d’éclairage public permettent de balayer délicatement le haut de la façade, tout en mettant en valeur l’écusson aux armes de la cité qui surmonte les baies, ainsi que l’arête distinctive de la couverture en cuivre.
Le palais de justice

Pour la mise en lumière du bâtiment, Sylvain Bigot a positionné les luminaires discrètement sur le bâtiment lui-même afin de préserver l’intégrité esthétique du monument, tant de jour que de nuit, en réutilisant des chemins de câble existants le long des corniches et en ajoutant des projecteurs en plongée.
« Le rez-de-chaussée bénéficie d’un éclairage en plongée, assuré par des projecteurs installés sous la corniche du premier étage. Cette technique permet de maintenir les fenêtres du rez-de-chaussée dans une relative pénombre, créant un jeu de contrastes clair-obscur avec le reste de la façade. Des projecteurs installés au pied des fenêtres du premier étage illuminent simultanément ces ouvertures et les riches ornements qui les surplombent. Cette continuité d’éclairage assure une cohérence visuelle avec le traitement lumineux du rez-de-chaussée. »