Elie Bouskela et Félix ont fondé Soliled en 2010. Depuis sa création, l’entreprise spécialiste de l’éclairage led et du bâtiment intelligent, a développé plusieurs compétences complémentaires : la fourniture de solutions clés en main pour le pilotage de l’éclairage et la gestion technique du bâtiment, ainsi que la représentation et la distribution de produits issus de fabricants leaders sur leurs marchés.
Elie Bouskela, avec l’équipe de Soliled composée de huit personnes, intervient dans l’éclairage architectural, fonctionnel, tertiaire, industriel, l’espace public, l’éclairage urbain, les transports, les musées ou encore les édifices religieux, couvrant ainsi un large spectre d’applications.
Qu’est-ce qui vous a donné l’idée de créer Soliled ?
Elie Bouskela – J’ai suivi un cursus d’ingénieur à Supélec dont je suis sorti diplômé en 1984. Après mes études, j’ai rejoint une entreprise américaine spécialisée dans les cartes électroniques et les semi-conducteurs. J’ai passé cinq années en Californie, près de San Francisco, avant d’être licencié en 2009. À ce moment-là, Félix Bensadoun, un ami de Supélec, revenait lui aussi en France après plusieurs années passées aux Philippines. Nous avons décidé de créer ensemble une structure. À l’époque, je baignais dans l’univers de la microélectronique et observais l’arrivée progressive des leds, dont je percevais le potentiel de rupture. Félix, issu de Schneider Electric, constatait quant à lui l’essor annoncé du bâtiment intelligent, moteur essentiel des économies d’énergie. Soliled est née de cette convergence, avec une double expertise : gestion technique du bâtiment et éclairage led. Nous avons rencontré Insta, une entreprise allemande issue de l’électronique et nouvellement tournée vers l’éclairage led, mais qui peinait à s’implanter en France. Nous avons ainsi démarré avec eux, tout en nous appuyant sur l’intégration KNX chez Schneider. Très vite, nous avons travaillé sur des systèmes de contrôle en DALI. Notre premier projet fut le siège du conseil régional du Languedoc-Roussillon : un bâtiment de 15 000 m² qui abritait environ 300 bureaux. Nous n’étions que deux, l’expérience fut marquante. Progressivement, nous sommes passés du tertiaire à l’éclairage architectural et avons commencé à répondre à des projets en DMX. Nous avons alors établi un partenariat avec Pharos Control, société anglaise développant des contrôleurs DMX à haute performance.
Votre premier grand projet en DMX date de ce moment-là ?

Elie Bouskela – Oui, en 2014, avec les jardins du château de Versailles. Nous avons déployé l’infrastructure DMX permettant le pilotage de l’éclairage des bassins, des statues, de la végétation, avec de nombreux points lumineux. Nous avons découvert à quel point un bon driver est essentiel pour obtenir un éclairage led fiable et maîtrisé. Cela nous a conduits à devenir partenaire du fabricant de drivers eldoLED, en France. Pour donner un ordre d’idée, la mise en lumière intérieure de Notre-Dame de Paris (conçue par Patrick Rimoux) comprend environ 650 drivers. Au fil du temps, nous avons développé des partenariats avec différents fabricants dont nous distribuons aujourd’hui les solutions, couvrant tous les besoins liés au pilotage de l’éclairage. Cette approche nous permet d’intégrer les équipements adaptés à chaque configuration.

Nous avons ainsi réalisé le contrôle et la supervision du musée national de la Marine à Paris. À l’entrée, 6 000 tubes lumineux dont 1 000 suspendus sont pilotés en DMX afin de créer des effets dynamiques. Impressionnés, les installateurs nous ont ensuite demandé d’assurer le pilotage DALI de l’ensemble du musée, puis la supervision globale. Nous avons aussi travaillé au Grand Palais, qui compte plusieurs milliers de luminaires. En collaboration avec l’agence 8’18’’ pour la définition des scénarios et avec les installateurs pour l’infrastructure, nous avons mis en place l’ensemble du dispositif de supervision de l’éclairage.
Vous rencontrez donc les concepteurs lumière très en amont ?
Elie Bouskela – C’est absolument nécessaire : nous avons besoin de comprendre ce que veut faire le concepteur lumière afin d’élaborer la meilleure programmation possible avec des outils adaptés. Lors du projet des jardins de Versailles, nous avions rencontré l’équipe des Éclairagistes Associés et discuté essentiellement d’électronique et de programmation, à une époque où la led arrivait à peine et où peu de concepteurs maîtrisaient ces aspects de l’électronique. Deux mois plus tard, en mars, ils nous demandaient de les accompagner sur la mise en lumière et surtout le pilotage ; le projet devait impérativement être livré le 20 juin de la même année. Autrement dit, nous avions moins de quatre mois. Aujourd’hui, les concepteurs lumière nous sollicitent très tôt, ce qui facilite grandement la coordination. Nous collaborons aussi de près avec les installateurs, qui sont les acteurs du terrain. Ils apprécient que nous puissions fournir les plans d’exécution et les coffrets techniques associés. La gestion des drivers déportés peut rapidement devenir complexe.

À Notre-Dame, près de 2 000 sources lumineuses sont alimentées via environ 650 drivers répartis dans une dizaine de locaux techniques, ce qui a grandement simplifié le câblage et la maintenance. Une fois l’installation finalisée, nous avons travaillé sur les scénarios et la programmation. Les séquences lumineuses quotidiennes ou hebdomadaires de Notre-Dame sont automatisées, tandis que les événements spécifiques comme Noël, Pâques et d’autres sont programmés manuellement par le régisseur. Dans des projets de cette ampleur, l’anticipation est essentielle, mais parfois difficile. L’exemple des Champs-Élysées l’illustre parfaitement.
Vous voulez parler des illuminations de Noël ?
Elie Bouskela – Oui, celles de 2025. Des contraintes d’installation nous ont obligés à concevoir 10 zones indépendantes, avec un contrôleur indépendant, un PC indépendant, un routeur 4G indépendant, etc. Or, la 4G peut générer jusqu’à 300 millisecondes de latence, soit 0,3 seconde d’écart. Thierry Reboul, concepteur du son et lumière, et Thomas Dechandon, créateur lumière, souhaitaient une synchronisation parfaite entre les dix zones, ce qui est était impossible avec le dispositif prévu. Nous avons donc tiré de la fibre optique, ajouté des câbles, des antennes et revu entièrement la configuration réseau pour répondre à cette exigence apparue en cours de projet. Chez Soliled, si une brique manque, nous la concevons. C’est ce qui fonde notre identité et notre expertise : une ingénierie capable d’orchestrer un show lumineux parfaitement synchronisé avec une précision de 0,3 seconde, conformément à l’intention du concepteur !
Propos recueillis par Isabelle Arnaud






