Comprendre l’espace de travail : interview de Frédérique Mansoux

Frédérique Mansoux : Directrice d’étude chez Génie des Lieux, architecte DPLG
Frédérique Mansoux : Directrice d’étude chez Génie des Lieux, architecte DPLG

Génie des Lieux est une entreprise de conseil indépendant en transformation des environnements de travail au service des maîtres d’ouvrage et des utilisateurs, particulièrement attachée aux usages et modes de travail. Frédérique Mansoux, associée, est spécialiste en aménagement des lieux du travail et accompagne les managers et collaborateurs dans la définition, la conception et l’appropriation de leurs espaces.

Lumières – Quels sont les critères que vous prenez en compte pour définir la notion de confort visuel au travail ?
Frédérique Mansoux – Architecte de formation, je suis particulièrement sensible à l’enveloppe globale du bâti, à la cohérence entre l’environnement architectural, l’aménagement et la vie dans les espaces considérés. L’éclairage s’inscrit dans un volume habité qui comporte des matériaux, des couleurs, des ouvertures, des équipements, mais aussi des usages. Il est essentiel de définir les activités qui vont se dérouler dans les espaces que nous devons aménager, de comprendre comment les collaborateurs vont occuper les lieux et comment ils vont y travailler.

Vous voulez dire que les tâches visuelles vont déterminer le type d’éclairage à mettre en œuvre ?
Je n’irais pas jusque-là. Le projet d’éclairage reste de la responsabilité du prescripteur, pour répondre aux normes en vigueur et aux certifications souhaitées par le maître d’ouvrage. Notre rôle consiste à prendre en compte l’architecture intérieure du bâtiment existant ou à venir et de la mettre en correspondance avec les usages futurs pour l’adapter si besoin. Nous nous limitons à donner des performances par activités, car dans un bureau, tout le monde ne fait pas la même chose : travail sur écran, au téléphone, lecture de documents, saisie de données, écriture, etc. Dans notre réflexion sur le concept d’aménagement, nous installons plutôt les salariés sédentaires près des fenêtres afin qu’ils bénéficient le plus possible de la lumière du jour. Les travailleurs « nomades » et les espaces de partage sont plus volontiers placés côté circulation. La position des armoires et leur hauteur sont à intégrer dès la conception pour ne pas faire barrage à l’éclairage naturel, point aujourd’hui bien compris des futurs occupants.

Quelles sont vos préconisations ?
Même si on s’appuie sur la norme EN 12464, en particulier pour les niveaux d’éclairement, on rappelle la possibilité, ou parfois la nécessité, de différencier les ambiances lumineuses en jouant sur les intensités, l’orientation, la répartition, les couleurs de lumière. Il existe une dualité entre les différents textes réglementaires à laquelle s’ajoutent les préconisations non obligatoires. D’un côté, des textes par zones, de l’autre, des occupants mobiles qui lisent, écrivent, regardent des objets partout dans l’entreprise. C’est plutôt la question de l’usage qui donne les paramètres et par conséquent les performances à atteindre. Ainsi, nous proposons des solutions plus ergonomiques, comme la gestion des températures de couleur ou encore la possibilité d’adapter l’éclairage à chaque poste de travail ou espace de partage.

Selon votre expérience, quels sont les facteurs déterminants d’un éclairage de qualité pour les utilisateurs ?
Sans hésitation, la capacité à moduler la lumière en fonction de la tâche visuelle, de son humeur, voire de ses déficiences visuelles est devenue une priorité. Des préférences apparaissent selon l’âge, le sexe, les performances visuelles de chacun ; par conséquent, pouvoir agir directement sur l’éclairage représente réellement une source de confort. Réguler l’éclairage artificiel selon les apports de la lumière du jour et bénéficier d’une détection de présence ou de mouvement constituent également un plus qui est entré dans les habitudes. L’éclairage dans les bureaux ne peut se résumer à des niveaux d’éclairement, il est devenu créateur d’ambiances et également un élément de l’aménagement à part entière. Avec les technologies disponibles aujourd’hui, nous l’intégrons sans mal au décor, aux éléments acoustiques, plafonds chauffants, à l’enveloppe du bâti. L’éclairage n’est plus pensé tout seul.

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