Installations photovoltaïques : bien se protéger contre la foudre

(c) Dehn

Alors que le nombre d’installations photovoltaïques croît d’année en année sur les habitations, les bâtiments tertiaires ou industriels, mais aussi au sol avec de grandes fermes photovoltaïques, le besoin de protection contre les dégradations éventuelles dues à la foudre est bien pris en compte avec des matériels adaptés à ces installations. Encore faut-il bien appliquer les normes et règles complexes pour une mise en œuvre efficace.

À mi-2017, plus de 350 000 installations photovoltaïques (PV) étaient en service en France, dont plus de 35 000 d’une puissance supérieure à 9 kW. Les exploitants de ces installations raccordées au réseau attendent un retour sur investissement sur plus de vingt ans. Or ces installations sont souvent très exposées à la foudre et aux surtensions, qui peuvent provoquer de gros dégâts aux modules et équipements électriques et électroniques et entraîner une perte d’exploitation importante pour un champ de plusieurs MW.

Des installations vulnérables aux dommages causés par la foudre
Les installations PV sont le plus souvent en toiture, mais aussi au sol, qui peuvent s’étendre sur plusieurs hectares, et sont ainsi exposées aux impacts directs de la foudre aptes à endommager les modules ou les câbles et dispositifs de connexion. Des destructions qui peuvent aussi toucher les équipements électroniques (onduleurs), électriques ou de communication, les installations étant souvent supervisées à distance. Ces dégâts vont être provoqués par des effets directs ou indirects de la foudre. Les effets directs proviennent de l’écoulement d’un courant de 1000 à 200 000 A en quelques microsecondes ; les effets indirects ont pour origine les impacts sur les lignes aériennes, les remontées du potentiel de terre ou le rayonnement électromagnétique. Dans la plupart des cas, et en particulier dans les régions plus touchées par la foudre (niveau kéraunique Nk >25), une protection adaptée va s’imposer.

Paratonnerre à dispositif d’amorçage. (c) Indélec

De l’analyse du risque à la mise en place de solutions adaptées à chaque installation
La première étape de mise en œuvre d’une protection efficace passe par une étude technique, précédée, si besoin, d’une analyse du risque foudre (ARF), réalisée suivant les normes en vigueur NFC 17-102 et NF EN 62305-3 et -4.

Ainsi, explique Arnaud Lefort, PDG d’Indelec, société spécialiste de la protection foudre qui vient d’inaugurer son centre de recherche LiRi dédié à la foudre : « Pour les installations sur bâtiment, on va mettre en place une protection contre les effets directs en vérifiant l’équipotentialité générale de ce bâtiment et que tout est bien relié à la terre. Pour les parafoudres, il faudra bien tenir compte des longueurs de câbles importantes. Pour les installations au sol, la protection est essentielle, en particulier dans les pays chauds et humides. L’exploitant ne prend pas de risque pour les centrales importantes : si un coup de foudre déclenche une inflammation des panneaux, les pompiers ne pourront probablement pas intervenir. L’analyse de risque donne alors un besoin de protection fort, par exemple dans le sud de la France. La mise à la terre des panneaux doit être réalisée soigneusement, en parfaite équipotentialité. Les paratonnerres tels que les PDA (paratonnerre à dispositif d’amorçage) vont couvrir chacun une certaine surface et leur implantation va dépendre de l’étude technique. »

Pour ces champs PV, une protection foudre pourra être installée sur le bâtiment abritant les équipements électriques (onduleurs, transformateurs, contrôle). Autre point à prendre en compte, selon Régis Reeb, directeur Marketing, Technique et Service de Dehn France : « sur un bâtiment, le positionnement des paratonnerres est important, afin d’éviter l’ombrage sur les panneaux et de respecter la distance entre ces paratonnerres et les panneaux. Les études peuvent se faire à partir de plans ou vues 3D. On pourra aussi utiliser des conducteurs isolés pour ne pas avoir d’amorçage entre les panneaux et les conducteurs de descente ».

Mât d’un paratonnerre protégeant une installation photovoltaïque au sol. (c) France Paratonnerre

Cette protection, si elle est installée, sera complétée par une protection anti-surtensions via la mise en œuvre de parafoudres. Le choix du type de parafoudres aux endroits névralgiques de l’installation dépendra de plusieurs paramètres : la présence ou non d’un paratonnerre, la longueur de déploiement des câbles. Ce choix, explique Christian Macanda, responsable Produits de Citel, « se fera à partir du guide européen CLC/TS 50539-12 et pour les marchés export en prenant en compte les normes IEC 61643-11 et 12, ou pour les États-Unis, la norme UL 1449 ». Des parafoudres de type 1 seront installés sur la ligne AC s’il y a un paratonnerre et sur la partie DC si le paratonnerre n’est pas isolé. Ces parafoudres seront de type 2 pour les accès AC (onduleur et raccordement au réseau) et DC s’il n’y a pas de paratonnerre. Pour les équipements raccordés aux réseaux de données ou à des sondes, l’installation d’un parafoudre « courants faibles » est fortement recommandée.

Chaque site étant différent et les normes et guides complexes, l’intervention d’un professionnel est indispensable pour mettre en place une protection maximale.

Montage en toiture d’un paratonnerre à dispositif d’amorçage et conducteur de descente. (c) Indelec

Une R&D toujours dynamique
Les technologies ne sont pas figées, les sociétés, petites et grandes, investissent en R&D, souvent en collaboration avec des organismes de recherche et des laboratoires d’essais. Pour les paratonnerres, la technique du PDA apparue en France dans les années 80 continue de se perfectionner et d’évoluer. Pour Arnaud Lefort, « la technologie PDA fait l’objet d’un processus continu de recherches et d’améliorations. Pour Indelec, une technologie laser est en cours d’étude et un nouveau produit, “Fast Connect”, est en phase d’exploitation : ce module de test autonome sécurisé permet de récupérer à distance des informations sur le paratonnerre, et peut être adapté sur d’anciens paratonnerres ». Pour les parafoudres, Citel mise sur sa technologie VG intégrant des éclateurs à gaz spécifiques « pouvant écouler, comme l’indique Christian Macanda, des courants élevés avec une absence de courant de fuite d’où une fiabilité accrue et une plus longue durée de vie (pas de vieillissement des varistances) ». Les progrès se font aussi avec une tenue en tension continue de plus en plus élevée. « Depuis quelques années, les principaux fabricants d’onduleurs PV sont d’accord pour travailler avec 1500 VDC de tension. Cela permet de réduire le courant du système et par conséquent la section des câbles et le calibre de quelques équipements. Globalement, la réduction du coût de l’installation est importante. Au niveau du parafoudre, les 1500 VDC représentent un vrai challenge pour les fabricants de cette technologie, car les distances d’isolement entre parties actives et système de déconnexion du parafoudre sont vraiment des points critiques », explique David Dumon, Applications Manager Surge Protection de Mersen.

Pour Régis Reeb, « certaines installations demandent des parafoudres avec des tensions de 1000, voire 1500 VDC et nous avons aussi développé un parafoudre de type 2 équipé de la technologie SCI alliant une protection efficace contre les surtensions et une protection des personnes, tout en éliminant les risques d’incendie en cas de défaut ».
Olivier Pellissier, Product Manager Trabtech & Power Supplies de Phoenix Contact France, explique : « Les parafoudres basse tension conformes à la norme EN 61643-11 sont adaptés aux réseaux électriques à basse tension en courant alternatif. La future norme CEI 61643-41, pour les parafoudres connectés à un réseau électrique basse tension en courant continu, est en cours de rédaction. Cette nouvelle norme ne devrait pas voir le jour avant 2020.

Protection d’un champ solaire par des paratonnerres. (c) Mersen

La principale difficulté concerne le mode de défaillance et le comportement du parafoudre en cas de fin de vie. Les parafoudres à basse tension sont équipés d’un déconnecteur interne qui assure la mise en sécurité lorsque le ou les composants internes sont usés ou détruits. Un courant de fuite apparaît, ce qui entraîne un emballement thermique qui doit être stoppé rapidement. Un déconnecteur thermique est souvent utilisé pour isoler les parafoudres du réseau. Le pouvoir de coupure de ce dispositif doit être suffisant pour couper le courant de court-circuit généré par la source de tension.

En courant alternatif, les déconnecteurs sont bien maîtrisés et permettent de couper des courants de plusieurs dizaines de milliers d’ampères.

En courant continu, le scénario est bien différent. En effet, le courant est constant et ne repasse jamais par 0. La coupure de l’arc est beaucoup plus contraignante et difficile à réaliser.

Forts de près de trente années d’expérience dans l’ingénierie des réseaux à courants continus, les ingénieurs de Phoenix Contact ont développé des parafoudres basse tension pour le courant continu qui intègrent des déconnecteurs particulièrement efficaces pour interrompre des courants de plusieurs centaines d’ampères. Associés à des fusibles externes, ces parafoudres type 2 peuvent être utilisés en aval de batteries d’accumulateurs dans des systèmes d’alimentation sans interruption (ASI) de forte puissance. Une gamme est déjà disponible de 48 à 380 VDC.

La recherche dans ce domaine n’en est qu’à ses débuts. Phoenix Contact a mis au point des protocoles d’essais spécifiques et s’est doté de moyens d’essais en courant continu capables de générer de forts courants de courts-circuits afin de consolider encore son laboratoire foudre. »

Jean-Paul Beaudet

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