Paris-Saclay, smart et territoire d’innovation

Centres de recherche, établissements d’enseignement supérieur, le plateau de Saclay concentre déjà près de 15 % de la R&D française. Avec les aménagements menés par l’EPA Paris-Saclay, le plateau devrait accueillir d’ici à 2020 près de 35 000 étudiants et pas moins de 45 000 chercheurs. Et faire ainsi du territoire un éco-territoire, siège d’un cluster d’innovation et recherche de niveau mondial.

« Paris-Saclay, c’est aussi le laboratoire de la ville du futur. L’EPA Paris-Saclay a pour ambition de concevoir et construire des quartiers mixtes, compacts, durables et aux usages mutualisés, qui répondent aux enjeux énergétiques et écologiques de demain », introduit Antoine du Souich, directeur général adjoint Stratégie et Innovation de l’EPA (Établissement public d’aménagement).

« Réseau de chaleur et de froid bas carbone innovant et basé sur la géothermie, récupération de la chaleur fatale des process et des datacenters, réalisation de bâtiments très performants, préservation de la biodiversité et des espaces agricoles productifs et des déchets selon les principes de l’économie circulaire, stationnement intelligent sont autant d’aspects de la stratégie d’éco-territoire appliquée par l’EPA pour l’aménagement de Paris-Saclay », complète-t-il.

Une production de chaleur à plus de 50 % renouvelable
« En matière énergétique, l’ambition est de faire de Paris-Saclay un territoire à énergie positive, c’est-à-dire un territoire sobre, qui valorise des énergies locales et renouvelables à grande échelle, et qui est piloté intelligemment, explique Antoine du Souich. Pour illustrer, nous avons au programme la sobriété énergétique, avec des bâtiments nouveaux très performants, la performance carbone avec un objectif C2 au niveau du label E+C-, notamment en s’appuyant sur des bâtiments à structure bois, la réhabilitation progressive de l’existant, mais au-delà de l’échelle du bâtiment, le réseau de chaleur alimenté de façon importante par la géothermie est une infrastructure essentielle qui présente bien des avantages par rapport à des solutions qui multiplieraient des infrastructures autonomes à l’échelle de chaque bâtiment, ou bien des réseaux de distribution de chaud et/ou de froid classiques. »

L’expert conclut : « Cette solution rend également possibles les échanges d’énergies (chaud et froid) entre les différents projets immobiliers, contribuant à une baisse du coût de l’énergie finale. Et elle permet de diviser par 2 les émissions de CO2 à l’horizon 2021. »

Filtres d’exhaure de la géothermie de la ZAC du Moulon. (c) IDEX

Le réseau de chaleur et de froid sera associé à un réseau électrique intelligent pour former le réseau multi-énergies intelligent de Paris-Saclay. À cette échelle, ce sera une première mondiale qui se fera en lien avec des industriels, mais également par des partenariats de recherche avec les institutions présentes sur le territoire (Université Paris-Sud, CEA…).
L’EPA Paris-Saclay exige une réservation de 30 % des toitures pour l’installation de panneaux photovoltaïques. Afin de ne pas pénaliser le bilan financier des opérations immobilières, l’EPA a fait le choix de ne pas imposer leur pose et leur financement par la maîtrise d’ouvrage, mais de permettre à un investisseur tiers de le faire. Des mesures conservatoires ont été imposées à l’ensemble des preneurs de lots, afin de rendre aisée et peu coûteuse l’installation d’équipements photovoltaïques après la livraison du bâtiment. « Dans ces conditions, le bâtiment est alors considéré comme “PV-Ready”. Une première consultation pour désigner un investisseur a été lancée pour 30 500 m2 de toitures d’ici à 2020 pour une puissance de 2,5 MWc et une production de 2,6 GWh », énonce Antoine du Souich.


EPA Saclay, un projet de territoire qui s’étend sur 27 communes et 3 communautés d’agglomération

La ZAC Polytechnique de l’EPA Saclay. (c) EPA Paris-Saclay/Alticlic.

Démarrées en 2010, deux ZAC en constituent le cœur de développement actuel, celle du quartier du Moulon et celle de Polytechnique, de 337 et 232 hectares respectivement, avec des programmes de construction de 870 000 m2 et de 837 000 m2. Une troisième ZAC, Corbeville, d’une dimension de 94 hectares incluant un corridor écologique de 30 hectares, est en cours de concertation.
D’autres zones d’aménagement y sont aussi incluses :
– Satory Ouest, qui accueillera dans le 8e quartier de Versailles un pôle urbain mixte autour d’acteurs de l’innovation sur les mobilités du futur ;
– le quartier Freyssinet à Trappes et Montigny-le-Bretonneux ;
– et sur Saint-Quentin Est/Guyancourt, un ensemble stratégique pour le territoire en termes géographiques, programmatiques et de desserte autour de la future gare de la ligne 18 du métro du Grand Paris.


La géothermie fait son « show » et aussi le froid à l’EPA Saclay

Les deux réseaux totalisent respectivement 8 et 6 km. (c) IDEX

« Dans le cadre de l’aménagement de l’EPA, la géothermie est dite “basse température” et les calories sont puisées à environ 30 °C dans une nappe située dans les couches de l’Albien à près de 700 mètres de profondeur. Compte tenu des spécificités du territoire, deux doublets et deux réseaux distincts ont été mis en place, l’un pour la ZAC du Moulon et l’autre pour la ZAC de Polytechnique », explique Jacques Brunet, directeur technique au sein d’IDEX, qui porte le projet de chauffage et réseau froid sur le territoire.

On retrouve le réseau géothermal, le réseau tempéré primaire, des réseaux d’eau glacée et des réseaux d’eau chaude.

Schéma de principe du réseau de chaleur et de froid. (c) EPA Paris Saclay

Les usages sur le territoire de l’EPA Saclay imposent d’avoir les productions simultanées de chaud et de froid au travers d’une installation basée sur des thermo-frigo-pompes six tubes : deux tubes pour la géothermie, deux pour le chaud et deux pour le froid. « Sur ces types de projets, il y a tantôt production de chaud, tantôt de froid et tantôt production simultanée de chaud et de froid, le solde étant en ce cas pris sur la géothermie, qui est le pivot de l’installation. En cas de besoins supplémentaires pour le chaud, un appoint centralisé est apporté par des chaudières gaz dans les deux chaufferies centrales de chacune des ZAC », détaille le directeur technique.

La chaufferie centrale de la ZAC du Moulon. (c) IDEX

« L’installation centralisée (IC) comprend également, en plus de la chaufferie, des tours aéroréfrigérantes et une station d’échange avec le doublet géothermal. Les tours aéroréfrigérantes seront utilisées de façon ponctuelle pour limiter à 10 °C la température de réinjection sur les doublets géothermies », précise Jacques Brunet.

La chaufferie gaz de la ZAC Polytechnique. (c) IDEX

« Par ailleurs, des calories peuvent être récupérées sur le retour du réseau froid pour compléter les besoins du réseau de chaleur et minimiser le recours aux chaudières gaz », explique l’expert.

Les 7 sous-stations d’îlots, intégrant des thermo-frigo-pompes de marque Carrier, assurent ainsi les productions d’eau chaude et d’eau glacée. À terme, 55 sous-stations de parcelles en géreront la livraison la livraison aux bâtiments raccordés. Au total, le réseau desservira près de 1 200 km² de surface à chauffer et/ou à refroidir.

Les tours aéroréfrigérantes de la centrale de la ZAC Polytechnique. (c) IDEX

L’énergie livrée sera de 40 GWh de chaud et 10 GWh de froid pour des puissances de 37 MW de chaud et 10 MW de froid. « On estime que 6 000 tonnes de CO2 sont évitées avec la solution en place par rapport à une installation 100 % gaz », complète l’expert.
« Les promoteurs peuvent inclure dans leurs projets du solaire thermique, par exemple, l’énergie produite serait soit consommée sur place dans l’immeuble, soit réinjectée pour d’autres bâtiments par le réseau ou bien sur la boucle de retour », ajoute-t-il.

Un projet réalisé à plus de 80 %
Les forages géothermiques, la réalisation des réseaux avec systèmes de détection de fuites et le calorifugeage ad hoc, la mise en place des installations centralisées, des sous-stations d’îlot et des sous-stations techniques de parcelles sont bien avancés.

Deux points clés sont en cours, la fin d’analyse et la mise au point technique des thermo-frigo-pompes, ainsi que le choix du système de supervision, qui doit être mis en place mi-2019. L’équipe projet est composée de près de 10 personnes d’IDEX et EGIS, en charge de la coordination et de l’avancement des prestataires BIR et GNT, pour la partie réseaux et canalisations, mais aussi des fabricants tels que Carrier, Viessmann ou Baltimore Aircoil.
« Un projet à fort retour d’expérience, avec une intelligence énergétique, bien sûr, mais pas seulement, car la donnée devient presque aussi importante que le MWh », conclut Jacques Brunet.


EPA Saclay – Le stationnement sera intelligent et mutualisé – Fabrice Luriot, directeur de Mobility by Colas

« Le but du projet Moov’Hub est d’offrir un service de mobilité global, et de décloisonner le monde du stationnement pour réguler la mobilité et le stationnement sur un territoire donné, et ainsi participer à la diminution de la congestion », introduit Fabrice Luriot.
La première étape consiste donc à connecter le territoire, et à cartographier l’offre de stationnement public comme privé pour guider l’usager vers les places disponibles, qui sont recensées en totalité, et ainsi valoriser toutes les possibilités de stationnement sur le territoire de Paris-Saclay.

« L’intérêt du système répond à un double objectif : pour la collectivité, avoir un observatoire du stationnement et de mobilité afin de réguler son territoire ; pour les usagers, avoir un accès unique via le compagnon de mobilité pour les différents services de stationnement existants en voirie, en ouvrage et en parking privés », explique-t-il. Il est également possible de se voir proposer des alternatives à l’usage de la voiture individuelle, notamment en cas de congestion (parking relais, covoiturage, transports en commun).

« Nous avons même envisagé une innovation concernant le stationnement en voirie qui change d’usage en fonction de la demande. Une même place pourra donc être tantôt classique, tantôt de type “livraison”, ou bien encore de type “covoiturage”. »
Au final, il s’agit donc de valoriser autrement le stationnement sur un territoire, en décloisonnant les offres de stationnement existantes, et à terme d’intégrer d’autres services de mobilité.

« Le groupement dont nous sommes chef de file regroupe trois startups, Opendatasoft, ParkingMap et Zenpark, et deux industriels, Colas et Nokia », précise Fabrice Luriot. C’est un partenariat d’innovation avec l’EPA Paris-Saclay, avec une première étape sur deux ans pour bâtir et mettre au point le service Moov’Hub. Un premier pilote est prévu en fin d’année avec quelques dizaines de places et un partenaire tiers. À terme, d’ici à 2022, 3000 places devraient être connectées et valorisées.

Jean-François Moreau

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