Ventilation : l’industrie 4.0 ne manque pas d’air

Ventilation par déplacement d’air en secteur automobile. (c) France Air

Usines et entrepôts connectés, usage des technologies numériques, de l’intelligence artificielle… l’Industrie 4.0 avance à grands pas. Santé et sécurité des personnels ainsi que confort du poste de travail et dépollution de l’air étant aussi au cœur de cette actualité, les solutions de ventilation industrielle sont-elles, de fait, cohérentes et adaptées ?

La QAI en environnement industriel, la nécessité de gérer toutes les spécificités de la ventilation
« Les spécificités et caractéristiques clés des bâtiments industriels sont souvent éloignées des contraintes classiques du tertiaire », introduit Frédéric Guillot, responsable de marché pour France Air. Et trois points sont incontournables à appréhender :

  • la très grande hauteur des bâtiments ;
  • les dégagements thermiques souvent importants des machines, robots et systèmes qui obligent à refroidir même en hiver ;
  • et enfin, pour certaines industries, la nécessité de traiter les polluants, particules, gaz, liés à la production.

« Plusieurs techniques sont possibles pour répondre aux enjeux de confort et de santé des postes des opérateurs. Mais, quel que soit le choix de la solution, la qualité de la diffusion doit assurer des conditions de confort aux opérateurs (absence de courant d’air, niveaux acoustiques, évacuation de polluants…) », poursuit l’expert de France Air.

Principe de diffusion d’air par mélange. (c) France Air

Avec la première technique, assez classique, appelée diffusion par mélange, l’air est introduit dans le local à une vitesse suffisante pour qu’il se mélange au mieux à l’air ambiant. « Dans ce cas, le fort taux de brassage induit une bonne homogénéité de la température et de la qualité de l’air en tout point du local », explique l’expert.

Deux limitations sont essentielles à la mise en place de cette technique, l’une concerne le volume du local qui, s’il est important, implique des débits à mettre en jeu très importants. La seconde limitation concerne le cas des process émetteurs de polluants, où la qualité de l’air globale est dégradée et dissémine la pollution. Dans ces cas, confort et santé des opérateurs, mais aussi performance énergétique, ne sont pas au rendez-vous.

Principe de diffusion d’air par déplacement d’air. (c) France Air

Pour Frédéric Guillot, de France Air, « la seconde technique, dite de diffusion par déplacement d’air, présente de nombreux avantages en termes de qualité d’air et d’économie d’énergie pour les bâtiments de grands volumes, et notamment pour les industries automobiles, aéronautiques, plasturgie, mécanique, métallurgie ».

La base de la diffusion par « déplacement d’air » est de fonctionner principalement en « tout air neuf », avec une introduction de l’air en partie basse directement dans la zone à traiter, à une température légèrement inférieure à celle de l’ambiance et à basse vitesse (0,2 à 0,4 m/s). Cet air frais se répand progressivement, sans courant d’air, dans la zone d’occupation. Au contact des sources chaudes – process, corps humain –, l’air se réchauffe et s’élève en partie haute du local par stratification, d’où il est extrait, filtré, puis rejeté généralement sans recyclage. Il y a ainsi très peu de mélange entre l’air soufflé et l’air ambiant, ce qui induit un très bon contrôle de la température et une excellente qualité d’air dans la zone d’occupation. Une stratification des températures se crée sur la hauteur du bâtiment engendrant une concentration de la chaleur et de la pollution sous la toiture. On crée ainsi, en quelque sorte, un faux plafond artificiel avec un air propre à proximité des opérateurs. Les polluants, la chaleur en excès sont ainsi repoussés à plus de 3 mètres de haut, voire plus.

« Cette technique est utilisée dans beaucoup d’industries variées, mais ne s’appliquera pas pour les locaux dont les besoins en chauffage sur une année sont plus importants que les besoins en froid, ainsi que pour les process nécessitant un contrôle précis de l’hygrométrie, ou encore pour les locaux nécessitant des conditions de température homogène sur la hauteur, par exemple les stockages de médicaments », précise Frédéric Guillot.

Comparaison des consommations énergétiques selon les techniques. (c) France Air

Pour des applications avec de forts apports thermiques ou de forts degrés de pollution, la solution par déplacement d’air permet (voir tableau) des gains énergétiques considérables, de l’ordre de 30 % sur les débits de ventilation et de plus de 40 % sur les puissances froides à installer.

« Avec des solutions qui, demain, comme celles existantes pour le tertiaire, pourront être proposées sous forme de systèmes complets de ventilation en autoconsommation photovoltaïque », conclut l’expert.

Salles blanches, blocs opératoires, une « approche chirurgicale » pour un air sain et de très haute qualité
« Les enjeux de la ventilation et de la diffusion d’air en environnement industriel sont très variés, cependant, une première famille de solutions se distingue pour répondre aux objectifs particuliers des salles propres et des environnements maîtrisés apparentés. Les secteurs concernés sont, par exemple, les laboratoires pharmaceutiques, chimiques et cosmétiques, l’agroalimentaire pour les produits à risques, mais aussi la microélectronique et les secteurs de haute technologie, ou encore le milieu hospitalier », explique Jean-Marc da Cruz, responsable Santé au sein de la société FläktGroup.

Et dans tous les secteurs d’activité concernés, quelles que soient leurs particularités, les salles propres et environnements maîtrisés apparentés ont pour référence la norme internationale NF EN ISO 14644 pour les salles propres et la norme française NFS 90-351 pour les établissements de santé. Ces normes définissent comme étant une « salle propre » une salle dans laquelle la concentration des particules en suspension dans l’air est maîtrisée, qui est construite et utilisée de façon à minimiser l’introduction, la production et la rétention de particules à l’intérieur de la pièce, et dans laquelle d’autres paramètres pertinents, tels que la température, l’humidité et la pression, sont maîtrisés comme il convient.

« Pour ces environnements, les solutions sont étudiées au cas par cas avec les bureaux d’études que nous accompagnons », poursuit l’expert de FläktGroup. L’une des techniques les plus courantes repose sur la création d’un véritable cœur d’air qui va venir apporter l’air neuf aux conditions optimales, mais aussi protéger la zone concernée et empêcher toute contamination.

« Le flux d’air est unidirectionnel, droit et dirigé de haut en bas, constituant ainsi un véritable mur qui repousse les contaminants externes. Le flux d’air est ainsi soufflé par des plafonds soufflants et pour le cas du champ opératoire, le plafond soufflant constitue une véritable bulle de protection d’air qui entoure le champ opératoire », détaille Jean-Marc da Cruz.

Plafond à flux unidirectionnel en bloc opératoire – polyclinique Cesson-Sévigné. (c) FläktGroup

Des caissons de reprise sont installés en partie basse et haute de la pièce, et pour éviter toute contamination croisée, les dispositifs de recyclage sont installés par blocs.

Pour les volumes plus limités, d’autres solutions existent, comme les FFU (filter fan unit) qui sont des caissons autonomes à flux laminaires avec un moteur et un filtre H14 ou U15 intégrés et qui permettent de recycler l’air de la salle tout en le filtrant.

Des solutions de ventilation « à la hauteur » des enjeux de l’Industrie 4.0
Tout comme les systèmes de production, les systèmes de ventilation sont connectés avec une régulation locale ou un pilotage déporté de la Centrale de traitement d’air (CTA) via une supervision. Sondes et pressostats au niveau des CTA permettent l’envoi d’alarmes en cas de perte de charge trop élevée, le suivi des températures et, epour certaines solutions comme les plafonds soufflants pour blocs opératoires, des LED de couleur au niveau du soufflage indiquent si la vitesse de l’air est correcte. Dans un futur proche, un ou des téléphones portables pourront être connectés aux informations essentielles afin de s’assurer que les conditions nécessaires pour le bloc opératoire sont remplies.

De l’importance de la filtration pour la qualité de l’air soufflé
« Quels que soient l’industrie, la qualité et le choix de filtration , cette dernière doit être adaptée à chaque environnement industriel, et on ne traite pas une salle blanche comme on agit sur d’autres procédés », souligne Jean-Marc da Cruz, de FläktGroup.

Dans les environnements de salles propres relevant de la norme ISO 14644, il faut assurer une qualité d’air exempte de polluants, virus et bactéries, et l’air est aspiré à travers des préfiltres et filtres fins, puis soufflé dans le volume de travail au travers des filtres absolus HEPA.

Pour lutter contre les odeurs et les gaz solvants, d’autres types de filtres tels que les filtres moléculaires seront mis en place. Concernant les ambiances explosives, des filtres ATEX pour les poudres, par exemple, équipent les systèmes le plus souvent sous forme de centrale en tour.

Jean-François Moreau


Le Covid (SRAS-CoV-2) quels points d’attention pour la ventilation ?

L’atelier Airbus Industrie avec système de diffusion par déplacement d’air. (c) France Air

Le document guide REHVA Covid-19 de l’AICVF détaille conseils et points d’attention pour faire fonctionner et utiliser les installations sanitaires et de conditionnement d’air des bâtiments et éviter la propagation du coronavirus (Covid-19) et du virus (SRAS-CoV-2) sur les lieux de travail commerciaux et publics notamment. Les principales préconisations :

  • accroître l’amenée et l’extraction d’air par accroissement des durées de fonctionnement, voire mise en ventilation permanente et, pour les systèmes régulés en CO2, par diminution du point de consigne pour assurer un fonctionnement prolongé à vitesse nominale ;
  • humidification et conditionnement de l’air n’ont pas d’effet sensible. À noter qu’« avec les preuves antérieures sur le MERS-CoV, il est reconnu aujourd’hui que l’humidification jusqu’à 65 % n’a qu’un effet très limité ou nul sur la stabilité du virus du SRAS-CoV-2. Par conséquent, il n’existe pas de preuve qu’une humidité modérée (HR 40-60 %) est bénéfique pour réduire la viabilité du SRAS-CoV-2 » ;
  • utilisation sécurisée des organes de récupération de chaleur : en présence de fuites, les systèmes de récupération de chaleur peuvent réintroduire des particules chargées en virus dans le circuit d’amenée d’air. Une inspection du système de récupération de chaleur peut être utile pour vérifier ses conditions optimales de fonctionnement ;
  • désactivation de la recirculation de l’air : « les particules virales circulant dans les conduits d’air extrait peuvent être réintroduites dans le circuit d’amenée d’air lorsque les centrales de traitement d’air sont équipées d’un dispositif de recirculation » ;
  • usage de purificateurs : utile en complément pour certaines situations, notamment pour les pièces au volume réduit, et avec des filtres de qualité HEPA (cf. norme pour les purificateurs NF 536) ;
  • le nettoyage des conduits n’a pas d’effet pratique si les procédures habituelles de maintenance et de nettoyage sont appliquées de façon satisfaisante ;
  • le changement des filtres extérieurs pour l’amenée d’air neuf n’est pas utile non plus.

 

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