Après la restauration du moulin de Pallières, c’est au tour de l’église Saint-Blaise, autre symbole patrimonial des Pennes-Mirabeau, de faire peau neuve grâce à une rénovation lourde et minutieuse. Fermée depuis 2018 à cause de fissures préoccupantes, la bâtisse était devenue impropre à l’accueil du public, qu’il s’agisse de cérémonies religieuses ou de simples visites.
C’est à Bruno Djiane, concepteur lumière, agence Bee Lux que la municipalité a confié la rénovation de l’éclairage extérieur et intérieur, tandis que Juliette Lutz, architecte du patrimoine au sein du cabinet Covalence a mené à bien l’ensemble du chantier à la fois technique et sensible.

Ce qui fait l’originalité de l’église, achevée en 1872, c’est son implantation singulière sur un front rocheux qui la domine et la fragilise tout à la fois. Juliette Lutz a pu identifier les origines des désordres : « Le percement de la rue de la République et le séisme de Lambesc en 1909 ont contribué à déstabiliser le bâti ; la nature du terrain au pied de l’édifice favorise l’accumulation d’eau ; enfin, les enduits intérieurs appliqués dans les années 1980 pour renforcer la structure ont eu des effets contre-productifs. »

Les travaux ont donc consisté à utiliser des matériaux soigneusement choisis, compatibles avec l’existant et garants de durabilité, que ce soit pour les façades extérieures ou pour les espaces intérieurs.
« Dans ce contexte, l’éclairage ne faisait pas partie des priorités initiales, souligne Bruno Djiane. La réflexion lumière n’a commencé qu’en toute fin de conception, limitée au début aux abords. Mais une fois la mise en valeur nocturne extérieure achevée, la maîtrise d’ouvrage m’a finalement sollicité pour imaginer également un dispositif intérieur. »
Un peu d’histoire
« Avant de concevoir une mise en lumière, j’aime toujours plonger dans l’histoire du site, raconte Bruno Djiane. Pour Saint-Blaise, j’ai consulté la documentation (1), relevé les informations disponibles sur les plaques à l’extérieur, et surtout, dialogué avec Juliette Lutz ainsi qu’avec Louis Jamin, en charge du suivi de chantier pour Covalence. »
L’église actuelle, dessinée par l’architecte marseillais Joseph Huot et exécutée par le maître maçon Badino des Pennes-Mirabeau, a été érigée à partir de 1869 sur l’emplacement d’une première église datant de 1070. Cette dernière reposait sur les ruines d’un ancien temple païen dédié à Cybèle, divinité féminine dont le culte était largement implanté dans la région antique. Les travaux furent suspendus par la guerre de 1870 et l’édifice ne fut inauguré qu’en 1872, à l’occasion des fêtes de Pâques.
Le style architectural marie inspirations grecques et romanes : le portail d’entrée est encadré de colonnes à chapiteaux corinthiens, typiques de l’Antiquité, et surmonté de fenêtres en triplet, référence symbolique à la Trinité dans l’architecture médiévale. Le clocher, rectangulaire à bases octogonales, parachève cette composition.
Au fil des décennies, divers aménagements se sont ajoutés, comme les terrasses latérales qui permettent d’accéder, depuis l’extérieur, à des espaces privés.
Éclairage extérieur : en gradation
« Cette morphologie particulière m’a inspiré l’idée d’une lumière progressive, allant du socle rocheux jusqu’au sommet du clocher, poursuit Bruno Djiane. J’ai donc défini une gradation en températures de couleur qui vont du plus chaud au plus froid : 2 200 K à la base, 2 700 K pour le premier niveau,
3 000 K pour la partie médiane, avec les encadrements des vitraux et abat-sons en 2 700 K, et enfin 4 000 K au sommet. »
La ruelle nord, attenante, bénéficie également d’un éclairage doux, apporté par des lanternes complémentaires. Pour l’ensemble du dispositif, le concepteur a retenu les solutions Lumenpulse, pour leur précision optique et leur fiabilité, directement intégrées dans les éléments architecturaux afin de rester invisibles le jour. « L’architecte ne souhaitait en aucun cas voir apparaître les câbles, explique Bruno Djiane. Nous avons donc percé la pierre afin de faire cheminer discrètement chaque alimentation, en parfaite harmonie avec la maçonnerie. »
Lumières intérieures : fonctionnelles et liturgiques

L’entrée occidentale de l’édifice s’effectue par un sas conçu comme une zone de transition entre la lumière naturelle du dehors et l’éclairage artificiel à l’intérieur. « Cet espace est doté de deux portes latérales, mises en valeur par des appliques horizontales installées au-dessus, précise Bruno Djiane. Ici, l’éclairage suit une programmation horaire, tandis qu’à l’intérieur il est activé manuellement selon les besoins : visites, messes ou préparation d’offices. Des appliques cylindriques à flux direct/indirect accompagnent par ailleurs les escaliers en pierre, en colimaçon, qui mènent à la tribune accueillant les fidèles lors des célébrations. »

L’intérieur, de style néoroman, se déploie en croix latine avec des voûtes d’arêtes et des travées marquées par des arcs en plein cintre. Six chapelles latérales, équipées de socles en marbre, abritent des autels et objets liturgiques – la plupart envoyés en restauration. Chaque arche a été reprise par des artisans spécialisés qui ont restauré fresques et tableaux.
« Pour magnifier l’espace, nous avons installé deux projecteurs discrets au pied de chaque colonne, explique le concepteur lumière. Le premier éclaire vers le haut et révèle la monumentalité des voûtes ; le second, orienté vers le bas et équipé d’une grille nid d’abeille, fournit un éclairage fonctionnel sans éblouissement. Les drivers ont été déportés à proximité pour minimiser l’impact visuel. »

Le choix et le calibrage des appareils ont été menés en étroite collaboration avec Lumenscia, partenaire technique du projet, afin d’obtenir exactement les effets recherchés, entre atmosphère liturgique et confort visuel.
La façade nord accueille une statue en marbre représentant Anne, Marie et Jésus. Elle a été mise en valeur par un faisceau serré à 4 000 K, température plus froide que les 3 000 K environnants, créant l’impression d’un rayonnement naturel, presque divin.

Chaque chapelle bénéficie en complément d’appliques murales latérales : l’une dirigée vers les fresques des arches, l’autre vers les bancs et autels.
Au-delà de la lumière, l’ensemble des enduits intérieurs a été refait à la chaux, garantissant à la fois respiration des murs et cohérence historique. Les fresques, les tableaux et les vitraux ont été restaurés avec minutie, tandis que l’orgue a bénéficié d’une remise à neuf complète, redonnant à l’église son éclat d’origine.
Grâce à cette double intervention, architecturale et lumineuse, Saint-Blaise retrouve aujourd’hui son rôle de monument vivant, à la fois lieu de culte, repère historique et écrin patrimonial pour la commune.
Maître d’ouvrage : Ville des Pennes-Mirabeau
Maîtrise d’œuvre : Covalence, Juliette Lutz, Louis Jamin
Conception lumière : Bruno Djiane, Bee Lux
Solutions éclairage : Exenia, Lightgraphix, Lumenpulse (matériels fournis par Lumenscia)
Installateurs : Equans pour la partie équipement ; Fauché pour la partie câblage DET : Deltexplan






