Ragni exporte le « fabriqué en France »

Marcel Ragni
Marcel RAGNI, président de Ragni © Franz Chavaroche

En 2017, alors que l’entreprise fête les 90 ans de sa création, elle se voit attribuer le label Entreprise du Patrimoine Vivant. Cette distinction délivrée par l’État distingue les métiers rares et les savoir-faire d’excellence. Marcel Ragni, président de la société et troisième génération du nom, ambassadeur de la French Fab pour les Alpes-Maritimes, nous raconte l’ascension de cette entreprise familiale spécialisée en éclairage public.

Comment Ragni est-elle passée de la ferronnerie d’art à la fabrication de mâts et de luminaires d’éclairage public ?
Marcel Ragni – L’histoire a commencé avec l’arrivée de mon grand-père, Victor Ragni, à Cagnes-sur-Mer, en 1927. Immigré italien, ferronnier d’art, il installe son atelier aux Vespins, au Cros-de-Cagnes. Il est rejoint en 1936 par son fils Joseph, qui donne, après la guerre, une première impulsion à l’atelier en apportant une dimension plus artistique au métier et en diversifiant les modèles fabriqués. Ses enfants Victor et Roger rejoignent à leur tour l’entreprise, respectivement en 1956 et 1959, et créent ensemble une société de fait. Quant à moi, j’intègre l’entreprise en 1971. En 1974, nous faisons construire l’usine du Vallon des Vaux et créons la SARL Ragni Frères, qui compte désormais cinq frères et sœurs. Au début des années 70, Ragni est le premier fabricant français de lanternes traditionnelles à utiliser de l’inox pour remplacer l’acier zingué. En 1989, nous rachetons les modèles et les droits de l’entreprise Clarel, jusqu’ici la référence en matière d’éclairage fonctionnel, et en 1993, c’est au tour des modèles de Soldi e Scati, un fabricant italien. À ce moment-là, Ragni se dote d’un service Recherche et Ingénierie appliquée au développement de nouveaux luminaires, et d’un laboratoire de photométrie qui permet de développer, dès 1995, le département export avec la création d’une équipe dédiée à la conquête de l’Europe, de l’Afrique et du Moyen-Orient. En 2004, Ragni devient une SAS et la quatrième génération prend le relais, avec mes deux nièces, Sandra et Stéphanie, et mes deux fils, Jean-Christophe et Stéphane. Si Ragni a su trouver sa place dans le secteur de l’éclairage, c’est grâce à son savoir-faire, cette âme d’artisan qui lui a garanti également une grande faculté d’adaptation, en particulier lors du passage à la technologie LED.

Est-ce que la LED a représenté un virage difficile à prendre ?
Non, pas pour nous. Dès 2005, nous présentions des produits pour remplacer les anciennes sources telles que les lampes à vapeur de mercure, puis les lampes sodium et enfin les lampes aux iodures métalliques. La principale difficulté à l’époque consistait surtout à maîtriser la dissipation de la chaleur et à proposer des performances photométriques avec des optiques adaptées à la LED. Notre bureau d’études et notre département R&D poursuivent leurs investigations pour proposer des solutions innovantes. L’industrie de l’éclairage connaît une grande transformation, notamment en ce qui concerne l’extérieur. L’éclairage public affiche son intelligence avec des systèmes qui communiquent entre eux et avec d’autres usages. Nous devons suivre cette évolution, anticiper les besoins des communes afn d’être prêts à fournir les solutions à même de répondre à la demande le moment venu. Cette réflexion requiert de notre part une constante remise en question et surtout une écoute de tous les instants. Il y a une différence entre perpétuer un savoir-faire et rester enfermé dans la tradition ; nous devons avancer avec la technologie et aller de l’avant en intégrant le plus possible l’intelligence dans nos produits, afin d’en garantir des performances élevées. Il en va de même pour la réglementation, c’est notre rôle d’accompagner nos clients de façon pédagogique et de traduire ce que le législateur a voulu mettre en place.

Vous faites allusion à l’arrêté du 27 décembre 2018 relatif aux nuisances lumineuses ? N’est-ce pas là un exemple typique d’une législation confuse, ou tout au moins peu explicite ?
Oui, il nous est arrivé de prendre peur à la première lecture d’un texte réglementaire dont celui-là, notamment. Mais nos discussions et échanges au sein du Syndicat de l’éclairage ou de Lighting Europe nous permettent d’analyser, de comprendre et de traduire cette réglementation afin de développer des luminaires qui répondent aux nouvelles exigences. C’est en somme le meilleur moyen pour contrer des produits exotiques qui arrivent sur le marché européen et pour offrir des arguments professionnels à nos clients lorsque nous lançons des produits innovants comme la colonne multifonction Korner. Cette solution prolonge la tradition des produits Ragni adaptables et personnalisables en regroupant cette fois de nouvelles fonctionnalités liées à la transformation des infrastructures urbaines. Tantôt colonne design, tantôt outil de communication, Korner est un support d’éclairage dynamique, qualitatif et atypique, au service de l’humain dans l’espace urbain. Elle constitue l’illustration de notre savoir-faire, qui nous permet d’aller au-delà des frontières et de nous faire connaître aux USA, en Afrique, et en Europe centrale. Cette volonté de développement permanent nous assure une croissance liée à l’export tout en conservant notre âme de fabricant français, comme le démontrent les travaux d’agrandissement de nos locaux actuels. Tous ces développements ne nous font pas oublier que l’humain reste au centre de tous les débats et surtout au cœur de nos préoccupations.

Retrouvez notre entretien avec Jean-Christophe Ragni ici.

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